Lee Bertin & Laure Gasme

En 1972, je n’étais pas encore abonné à L’express : trop jeune.

Mais je comprends ce qu’a pu ressentir F. Beigbeder, qui vient de livrer ce souvenir au Nouvel Observateur :

« C’est curieux : les gens à qui vous demandez de dévoiler leur obsession dans cette rubrique ne citent jamais quelque chose de sexuel. Moi, mon obsession est une couverture de L’Express du 1er septembre 1975. On y voyait l’actrice principale du film Histoire d’O, seins nus, le corps zébré, en sueur, les bras attachés en l’air. J’avais 10 ans et cette image reste pour moi une des choses les plus excitantes de ma vie : on ne voit pas souvent une image aussi sexy en couverture d’un magazine grand public. La semaine suivant la parution de ce numéro et de cette impétueuse photographie de Corinne Cléry, j’ai été dénoncé à mes parents par les curés de l’école Bossuet : j’avais dessiné sur mes cahiers des femmes nues suspendues à des poulies, fouettées…Je pense qu’ils ont dû se demander où j’avais eu pareilles idées, eux qui m’enseignaient la flagellation et la crucifixion du Christ. J’étais juste un lecteur lambda d’un célèbre news magazine. Depuis, j’ai bien sûr lu le roman de Dominique Aury, la BD de Crepax et vu le film de Just Jaeckin. Je sais que Corinne Cléry a été James Bond Girl, puis a eu une carrière approximative d’actrice de séries B italiennes. Mais rien ne remplacera jamais mon premier trouble puissant à la vision de cette couverture perverse de L’Express sur la table basse du salon (…) Aujourd’hui, je travaille pour un magazine qui met des filles nues en couverture…Les plus belles obsessions sont celles qui durent toute la vie. »

Je comprends, mais je ne partage absolument pas ce goût pour les femmes attachées, pour moi, ce que l’on voit, c’est proche de l’esclavagisme, une femme à la merci d’un homme potentiellement excité à l’idée de voir souffrir autrui, ou de lui faire des choses sans lui demander son avis.

Faut qu'y ait à béqueter !

S'il n'y a rien à se mettre sous la main, la langue, si ça rappelle Dachau, l'envie disparaît. Ne reste que la pitié, et c'est fichu. Non à l'isoutenable légèreté de ces êtres.

Un demi quintal semble un bon seuil minimal, afin d'éviter le sac d'os. Veiller à fixer également une borne haute.